Candela Capitán - SOLAS © Daniel Cao
EUROPALIA, le festival qui, tous les deux ans, propose un programme artistique pluridisciplinaire
autour d’un pays ou d’un thème spécifique, célèbre cet automne sa 30e édition avec une grande biennale espagnole. Quarante ans après une première édition en 1985, EUROPALIA ESPAÑA déploiera, du 8 octobre 2025 au 1er février 2026, un programme pluridisciplinaire alliant patrimoine et formes d’art contemporain. Il offrira des perspectives fascinantes sur des thèmes qui nous relient et nous interpellent.
Avec Francisco de Goya comme figure centrale et source d’inspiration, ce festival met en lumière la richesse culturelle de l’Espagne à travers les arts visuels, l’architecture, le théâtre, la danse, la musique, la performance, le cinéma et la littérature. Il réunit aussi bien des noms prestigieux que des figures moins connues. Les équipes artistiques des deux pays ont délibérément choisi des artistes issus de différentes générations, non seulement de grandes villes comme Madrid et Barcelone, mais aussi d’autres régions en Espagne.
Quarante ans après la première fois où EUROPALIA s’est consacré à l’Espagne, la question de comment re-présenter EUROPALIA ESPAÑA s’est posée. Cela a conduit le festival à se pencher sur les évolutions qu’a connues la société espagnole depuis le début de la démocratie et son intégration à l’Union européenne en 1986, tout en explorant la création artistique au cours des quatre dernières décennies.
Francisco José de Goya y Lucientes - The sleep of reason produces monsters (No. 43), from Los Caprichos
Le festival s’ouvre avec l’exposition principale « Luz y Sombra. Goya et le Réalisme espagnol » à Bozar (Bruxelles), qui se tiendra du 8 octobre 2025 au 11 janvier 2026. Cette exposition est construite autour de l’un des maîtres incontestés de l’art espagnol, dont la sensibilité moderne résonne plus que jamais aujourd’hui. Goya (1746–1828) est connu pour ses portraits saisissants et ses scènes populaires colorées. Son œuvre se distingue également par des images socialement critiques, dénonçant la guerre et les abus de son époque.
Sous le commissariat de Rocío Gracia et Leticia Sastre, accompagnées des membres du comité scientifique José de la Mano, Anna Reuter et Rocío Robles, l’exposition invite à réfléchir à l’œuvre de Goya sous un angle contemporain. Goya et le « goyesque », avec toutes les connotations de lumière et d’ombre, se sont imposés dans l’imaginaire occidental depuis le XIXe siècle comme des modèles, des stéréotypes de l’authentiquement espagnol. Loin de les rejeter, cette exposition utilise ces clichés comme un tremplin, cherchant à identifier la forme et les références de certains de leurs schémas fondamentaux afin de mieux comprendre « l’identité espagnole »
Goya a vécu à une époque de crises, de transformations et de bouleversements, avec toutes les incertitudes et les possibilités que cela engendre – une période peut-être similaire à la nôtre. Il a capturé le présent de son temps, créant un miroir dans lequel nous continuons à nous voir, même si nos époques diffèrent. Sa contribution à la construction de l’imaginaire collectif espagnol est indéniable, tant en Espagne qu’au-delà, non pas à partir d’une perspective idéalisée ou idéalisante, mais plutôt d’un regard critique et visionnaire.
L’exposition rassemble des peintures, dessins et gravures de Goya, mais aussi des œuvres de ses contemporains et d’artistes des générations suivantes (José Gutiérrez Solana, Pablo Picasso, Antonio Saura, entre autres). En outre, de nouvelles créations pluridisciplinaires, signées notamment par l’artiste visuelle Asunción Molinos Gordo, l’artiste sonore Francisco Lopez, le réalisateur Albert Serra ainsi que des écrivains espagnols et belges contemporains, contribuent à démontrer la pertinence de l’œuvre de Goya aujourd’hui. L’ensemble de quelque 200 œuvres explore l’héritage de Goya et la portée de son œuvre dans l’image de l’Espagne.
Du 8 octobre 2025 au 11 janvier 2026 à Bozar, Bruxelles
Luz y Sombra. Goya et le Réalisme espagnol : catalogue d’exposition
Auteurs: Anna Reuter, José de la Mano, Leticia Sastre Sánchez, Rocío Robles Tardío, Rocío Gracia Ipiña
Publié par Pelckmans
Graphisme par Sara De Bondt
280 p. / Tirage : 4 000 exemplaires. ANGLAIS (supplément en espagnol à confirmer) / Couverture rigide, 25 000 mots / 200 illustrations (hors textes institutionnels, biographie de Goya, bibliographie et colophon. Légendes / notes de texte non comprises).
Caprichos, Disparates et Désastres de la Guerre [Caprices, Folies, Désastres de la Guerre] sont les titres de trois séries de gravures et trois termes qui incarnent l’esprit critique et visionnaire de Goya. Ces œuvres ont inspiré l’ensemble du programme d’EUROPALIA ESPAÑA, permettant de relier passé et présent, local et global. Ces séries sont des sources d’inspiration pour appréhender le présent et explorer des thématiques contemporaines. Comment les Caprichos, les Désastres de la guerre ou les Disparates de Goya se manifesteraient-ils aujourd’hui ? Quels sont nos caprices, nos désastres, nos absurdités ? Ici, le « nos » vise à transcender les identités, tout comme Goya l’a fait, pour s’adresser à la communauté la plus large possible. Il en résulte des thèmes sous-jacents qui, bien que particulièrement présents en Espagne aujourd’hui, résonnent plus largement : la (Re) présentation, le collectif, la démocratie et l’eau.
CAPRICHOS : les Caprichos représentent l’inspiration, l’originalité et la liberté créative. Dans l’œuvre de Goya, les Caprichos reflètent une attitude libre face aux conventions sociales et culturelles.
Dans le contexte contemporain, ce terme peut se rapporter au consumérisme, à la culture de l’excès et au culte de l’image. Le sous-thème de la (re)présentation explore comment les images et les identités sont
créées et perçues, en se concentrant notamment sur les réseaux sociaux et la construction des idéaux.
L’exposition « Resolución. On lifetime decisions in Spanish cinema » au MoMu (Anvers) examine le cinéma espagnol et la manière dont les femmes sont représentées lors de moments charnières de leur vie, tels que des départs, des séparations et des meurtres.
L’œuvre « The White Cube is Never Empty » de Cristina Garrido au MACS (Hornu) interroge la représentation visuelle et la reproduction photographique des arts visuels.
Dans son solo « The Making of a Lethargy » (Monty, Anvers; Dans in Brugge), le jeune performeur Héctor Espuela Pablo déconstruit le conte de la Belle au bois dormant à travers une perspective trans et non-binaire. Alberto Cortés remet en question les récits capitalistes, patriarcaux et normatifs dans sa performance solo « One Night at the Golden Bar » (Théâtre les Tanneurs, Bruxelles et CAMPO, Gand), interrogeant la manière dont nous définissons et vivons l’amour dans un monde qui façonne et sape nos idéaux romantiques. Candela Capitan dénonce le male gaze et joue avec des poses féminines provocantes dans sa performance « Solas » (DE SINGEL, Anvers). Dans « Dirty », Juan Domínguez invite les participants à travailler l’argile, critiquant ainsi la hiérarchie du visuel et mettant en avant le potentiel politique du toucher et du son.
Au Musée Royal de Mariemont, l’exposition patrimoniale « Marie de Hongrie. Art & Pouvoir à la Renaissance » montre comment Charles Quint, et plus particulièrement sa sœur Marie de Hongrie, ont compris que le pouvoir reposait dans l’art de la représentation, afin d’assurer une domination fragile en Europe pour le successeur de Charles Quint, Philippe II. Depuis son palais de Binche et son domaine de chasse à Mariemont, Marie a développé un programme de propagande, se forgeant une place unique dans un monde alors exclusivement masculin. Au Snijders & Rockoxhuis à Anvers, l’artiste visuel Santiago Ydañez engage un dialogue avec la collection du musée, recréant, copiant et re-présentant les images à travers des peintures et des installations monumentales.
DISPARATES : dans cette série de gravures, Goya décrit des situations absurdes, grotesques, surréalistes ou irrationnelles, utilisant l’hyperbole, l’humour et la satire pour exprimer une critique sociale. Cela nous permet d’aborder des questions telles que la confusion entre le réel et l’absurde, ainsi que des problématiques telles que l’inégalité économique ou les préoccupations liées au genre et à la communauté LGBTIQ+. Face à un mode de vie consumériste et individualiste, nous souhaitons réaffirmer les liens, la connexion, qui nous unissent, afin de mieux affronter les défis à venir.
Les sociétés d’Europe du Sud et du bassin méditerranéen sont souvent perçues de l’extérieur comme des sociétés où les liens familiaux, interpersonnels, intergénérationnels et intracommunautaires sont très forts. De nombreux artistes et pratiques artistiques, y compris des traditions collectives, se concentrent sur la création, le renforcement ou la remise en question de ces liens, tout en réfléchissant à l’évolution, aux besoins et aux transformations des sociétés.
Dans « Rituales », durant la semaine de la Toussaint, les traditions qui nous relient à nos proches défunts se croisent : le duo de chanteuses Tarta Relena et Sara García Fernandez élaborent un rituel autour du pain (dans les cimetières de Louvain, Ostende et au Four à Chaux de Tournai). « Cuerpos Celestes » (« corps célestes »), par la compagnie théâtrale El Conde de Torrefiel, est une visite audio-guidée du cimetière Zuiderbegraafplaats à Gand, imaginée comme une ville cachée habitée par des résidents silencieux.
En Espagne, des personnes de différentes générations et origines se réunissent également pour des rituels, des célébrations et des traditions fondées sur des particularités sociales, religieuses ou culinaires, comme les Fallas à Valence ou la Semana Santa dans diverses villes. Partout en Espagne, la danse, le chant et la musique servent aussi à créer des liens, le flamenco étant un exemple emblématique dans plusieurs provinces. Le commissaire et artiste Pedro G. Romero développera un focus flamenco du 24 au 30 novembre à Bozar, au KVS, au Musée Constantin Meunier et dans d’autres lieux. Au Concertgebouw de Bruges, Marcos Morau chorégraphie le Ballet Nacional de España dans « Afanador » : une performance intense avec trente-sept danseurs, inspirée par le flamenco et plus largement par le folklore andalou. Yinka Esi Graves mêle flamenco et autres formes d’expression corporelle dans « The Disappearing Act », offrant une perspective contemporaine depuis la diaspora africaine. Elle se produira au Théâtre Royal de Namur et à Dans in Brugge.
Dans la nouvelle création « Chapters of Celebrations » de Benjamin Abel Meirhaeghe, Wouter Deltour, le B’Rock Orchestra et Muziektheater Transparant (en coproduction avec DE SINGEL, Anvers, également présentée au Palais des Beaux-Arts de Charleroi et au Wintercircus de Gand), la musique de la « Folia » du XVIIe siècle se transforme en rythmes rave, fusionnant des chorégraphies espagnoles et belges qui incarnent l’extase collective, le pouvoir de la musique et de la danse, ainsi que l’interconnexion des communautés queer.
Les dessins sur vitrine et l’atelier « The Day I Left Home » de Jesús Cisneros au Muntpunt (Bruxelles) mettront l’accent sur le rôle de la bibliothèque comme lieu d’accueil pour les nouveaux arrivants au sein de la communauté. Les nombreuses formes d’écritures qu’elle abrite, toutes ces œuvres diverses, nous invitent à nous connecter à différentes cultures tout en constituant un espace de résistance et de réparation.
Ballet Nacional de España - Afanador © Merche Burgos
DESASTRES : les « Désastres » de Goya dépeignent les horreurs de la guerre et de la violence. Aujourd’hui, plus que jamais, il est essentiel de célébrer la Démocratie dans un monde où celle-ci est sous forte pression. Au cours des cinquante dernières années, depuis le début de la transition démocratique en Espagne, de nombreux artistes ont revisité l’histoire récente pour tenter de la comprendre, se sont activement engagés dans la lutte pour l’établissement ou la consolidation de la démocratie, ou ont esquissé leurs rêves d’un avenir plus juste et plus libre.
Dans la pièce de théâtre « 1936 » au KVS (Bruxelles), l’un des événements les plus marquants de l’histoire espagnole est exploré : la Guerre civile espagnole (1936-1939), qui a marqué le début du régime franquiste. L’exposition « Villages of Colonisation » à l’Ambassade d’Espagne met en lumière les villages construits par Franco pour peupler et exploiter l’Espagne rurale. Plans, maquettes, films et interviews avec des habitants actuels illustrent l’évolution de ces paysages et interrogent la manière dont l’héritage de la dictature est traité aujourd’hui. Au S.M.A.K. à Gand, l’exposition collective « Resistance » réfléchit au pouvoir des images pour infiltrer, dénoncer et collectiviser des idées dans la lutte pour des valeurs démocratiques contemporaines.
Le compositeur, pianiste et percussionniste Aitor Etxebarria présente sa composition « Gernika 85 », en référence au bombardement de sa ville natale, Gernika, au Musée des Beaux-Arts d’Anvers, où les jeudis soirs de décembre seront consacrés à EUROPALIA ESPAÑA.
La série de films « Dreams of the Future » à la Cinematek (Bruxelles) est structurée en deux volets : « Eager for a Future (1975–1981) », qui présente des films et documentaires retraçant la période de transition espagnole, et « Dreamed Futures (2010–2025) », avec des œuvres abordant les tensions de la société contemporaine, entre l’incertitude provoquée par la crise mondiale et la nécessité de renouer avec des rêves d’avenir.
Dans le contexte actuel, le terme « désastre » peut également désigner une série de crises mondiales : instabilité politique, effondrement environnemental, conflits sociaux et armés, luttes décoloniales. Le programme accorde une attention particulière au thème de l’Eau, un élément essentiel dans l’histoire de l’Espagne. Les artistes et auteurs partent de ce thème pour aborder à la fois sa beauté et des questions brûlantes telles que le changement climatique, la migration et le tourisme : des enjeux qui concernent non seulement l’Espagne mais le monde entier.
« Dragon, Rest Your Head on the Seabed » est une composition pour six nageurs synchronisés dans une piscine, développée par Pablo Lilienfield et Federico Vladimir, fusionnant danse, sport, hydroféminisme et fiction spéculative. Un conte mettant en scène un moi démembré et genré : un moi transindividuel reconstitué par le liquide et formé par la subjectivité multiple des six nageurs (Piscine Wezemberg, Anvers).
Maider López développe une performance collective autour de la rivière Senne à Bruxelles, un cours d’eau au rôle historique majeur pour la capitale, aujourd’hui enfoui sous les rues et les places.
Comme le suggère son titre, « Fires » par Ça Marche se concentre sur l’élément opposé à l’eau : le feu. Cette installation immersive dans le Parc Astrid à Gand (en collaboration avec CAMPO) aborde non seulement le pouvoir destructeur du feu, mais également notre relation primordiale avec cet élément qui a façonné à la fois notre évolution et notre imaginaire.
Ça marche - Fires
EUROPALIA ESPAÑA propose environ 100 événements réunissant près de 170 artistes, répartis à travers la Belgique dans plus de 80 lieux. Les équipes artistiques des deux pays ont délibérément choisi des artistes issus de différentes générations, non seulement des grandes villes comme Madrid et Barcelone, mais aussi d’autres régions en Espagne. Le programme inclut également « territorio », une plateforme coopérative dédiée à la diffusion et à la recherche dans le domaine des arts vivants au sein des diverses communautés espagnoles, créée par le KVS (Bruxelles) pour promouvoir une construction plus collective et diversifiée. Par ailleurs, « Tapas Poetas » réunit quatre autrices qui récitent des poèmes dans les quatre langues officielles de l’Espagne, tandis que le public savoure des tapas et du vin espagnols (VIERNULVIER, Gand, en collaboration avec le Poëziecentrum).
Le festival met à l’honneur des artistes établis depuis plusieurs générations, tels que Juan Dominguez, Cuqui, Maria Jerez, La Ribot, Mal Pelo et Esther Ferrer, ainsi que de jeunes talents comme Nuria Guiu, Las Huecas, Elena Medel et La Chachi. Certains entreront en dialogue avec des artistes de Belgique ou d’autres pays pour créer de nouvelles œuvres, comme Suso Saiz avec Echo Collective, ou les quatre danseurs et musiciens espagnols de « Pick-Up Club » (en coproduction avec Charleroi danse), qui auront un « blind date » artistique avec quatre danseurs et musiciens résidant en Belgique.
Le festival accueillera des noms reconnus tels que l’ensemble de musique baroque Cantoría, la metteuse en scène Angélica Liddell, le pianiste Javier Perianes, le cinéaste Albert Serra, le danseur Israel Galvan, l’icône du design Patricia Urquiola (CID, Hornu) et l’écrivain Agustín Fernández Mallo, tout en mettant également en avant des artistes moins connus, notamment en Belgique, tels que le cinéaste/designer Iván Zulueta, ainsi que les artistes Marta Azparren, Esperanza Collado et Elsa Paricio.
Ensemble, ils incarnent une Espagne plurielle et un monde pluriel, qu’EUROPALIA souhaite connecter à un public diversifié, en collaboration avec un riche réseau de partenaires.
« EUROPALIA ESPAÑA représente une occasion unique de plonger dans le patrimoine culturel et artistique de l’Espagne, tout en réfléchissant aux enjeux contemporains mondiaux à travers le prisme de l’œuvre de Goya. En tissant des récits historiques avec des expressions artistiques contemporaines, le festival invite le public à explorer les complexités de l’identité, de la communauté et de la démocratie en Espagne et au-delà. En célébrant ce cap, nous nous réjouissons des connexions et des dialogues qui émergeront, enrichissant notre compréhension du passé tout en inspirant les générations futures à poursuivre la conversation. »
— Maral Kekejian & Dirk Vermaelen, directeurs artistiques d’EUROPALIA ESPAÑA
Ce programme est coorganisé par le Ministère des Affaires étrangères, de l’Union européenne
et de la Coopération de l’Espagne, par l’intermédiaire de l’AECID, avec la coopération essentielle d’Acción Cultural Española (AC/E) et avec le soutien de l’Instituto Cervantes, du Ministère de la Culture et du Commissaire pour la célébration des 50 ans de la Liberté en Espagne, partenaires institutionnels de cet événement.